Révélé au grand public en 2006 grâce à la chanson « U-Turn (Lili) », utilisée dans la bande originale du film doublement césarisé « Je vais bien, ne t’en fais pas », le duo AaRON a sorti son nouvel album Anatomy Of Light, le 18 septembre. Nous avons pu à cette occasion échanger avec Simon Buret, chanteur et multi-instrumentiste du duo.
Parles-nous un peu de votre duo, comment vous êtes-vous lancés dans la musique ? Quel a été l’élément déclencheur pour vous associer ?
J’ai commencé la musique au conservatoire, en prenant des cours de violon. Olivier (Coursier, NDLR) a lui débuté en autodidacte. Lorsqu’on s’est rencontré, il venait de quitter son groupe, Mass Hysteria, et je cherchais à mettre mes poèmes en musique, d’où la création du duo.
Plus jeune à la maison avec tes parents écoutais-tu beaucoup de musiques ?
Oui, la musique résonnait en permanence dans la maison. On écoutait beaucoup de chanson française, Barbara, Brassens, mais aussi des grandes voix du rock et du jazz comme Janis Joplin ou Nina Simone. Le jazz était très présent dans ma famille, avec un artiste comme Dizzy Gillespie par exemple.
Est-ce un choix personnel d’avoir commencé la musique jeune, ou une incitation de tes parents ?
Pas du tout c’est venu de moi, ça été le déclic lorsque j’ai assisté à un concert du violoniste de jazz Stéphane Grappelli quand j’étais tout petit. Ça a été un choc, je me demandais ce qu’était cet instrument, ce son et j’ai eu instantanément envie d’apprendre à en jouer.
Quelle est la chanson ou l’album qui t’as le plus marqué durant l’enfance ?
Dur de choisir un album ou une chanson en particulier, je te citerais deux grandes voix françaises : Barbara & Léo Ferré, qu’on écoutait également beaucoup à la maison.
Et aujourd’hui quels sont les artistes qui t’inspirent ?
Étonnamment en terme de musique, il n’y a pas d’artistes en particulier qui m’inspirent. Avec Olivier on s’inspire beaucoup d’images. On essaie de transformer les émotions qu’elles nous inspirent en musique. Je me sens bien plus inspiré par certains poètes, comme le Suédois Tomas Tranströmer par exemple, ou un photographe comme Gregory Crewdson dont j’aime redécouvrir les livres lorsque l’on est en studio. Ou bien encore dans le domaine de la peinture, je trouve si puissant ce qui se dégage des tableaux d’un artiste comme William Turner par exemple. Mais c’est souvent un sentiment, une émotion, voire la nature elle-même qui nous inspire. Par exemple pour la chanson « The Flame » qui ouvre le dernier album, c’est la lumière flamboyante & écrasante du désert du Nevada qui a été retranscrite dans la maquette qu’Olivier m’a envoyée. Pour « Ultrarêve », toujours sur l’album, c’est un court-métrage de Yann Gonzalez, « Les îles », qui m’a marqué et a été la première impulsion pour l’écriture de ce titre.
Une question un peu plus sociale maintenant : comment avez-vous vécu le confinement ?
Décrivez-vous cette période comme une parenthèse qui a été propice à l’imagination et à l’inspiration ou bien le contraire ?
Non j’étais très productif pendant le confinement, je ne voyais pas les heures passer, je n’étais pas malheureux du tout dans ce cocon. Olivier et moi avons de la chance d’avoir des appartements agréables avec des espaces extérieurs. D’ailleurs bien souvent je me rendais compte que c’était la fin de la journée lorsque j’entendais les applaudissements à la fenêtre. C’est le déconfinement qui m’a stressé le plus, je pense que la solitude n’est pas dangereuse quand on est un artiste. On a beaucoup de choses à faire, à dire, à créer, et même si sortir et me promener à ma guise me manquait, et bien toute ces envies refoulées j’ai réussi à les exprimer par la peinture.
As-tu des anecdotes des premiers tournages de clips à nous dévoiler ?
(Rires) Lors du tournage du clip pour le morceau « Les rivières », on s’est retrouvés en costards-cravates dans la mer, tout en devant faire semblant de se noyer ! Certes on s’agrippait à une corde mais on a commencé à flipper car le courant nous emmenait loin, et ce n’était plus vraiment du jeu ! Quand on me voit recraché par la mer sur le rivage, c’est complètement naturel ! Au final on a vraiment réussi à saisir une émotion, à faire s’opposer un élément inventé par l’homme, le costard cravate, symbole du travail et de l’activité humaine, tout ça perdu au beau milieu de la mer, symbole de vie, de la liberté, et surtout élément central sur notre planète recouverte en majorité d’eau.
“On est les premiers spectateurs et auditeurs de ce qu’ont fait”
Pour le clip de « Ultrarêve », vous vous êtes offert la présence de Jean-Claude Van Damme pour une chorégraphie aussi surprenante qu’amusante ! Comment s’est passée votre rencontre avec JCVD ?
Jean-Claude m’a appelé il y a 3 ans, en plein travail sur son long-métrage, car il voulait qu’on collabore pour la la bande originale de son film. Suite à ça, le lien est resté. Lorsqu’est venue l’idée de trouver une sorte d’étendard pour « Ultrarêve », nous avons directement pensé à lui. Ce qui était important pour nous c’était que le message passe, que ce ne soit pas simplement des phrases types, mais un slogan pour l’acceptation. On voulait que notre public comprenne que cette chanson parle de toute la fragilité du monde, de l’acceptation de soi qui est un combat extrêmement compliqué à mener, notamment par rapport à tout ce que l’on traverse dans nos vies aujourd’hui avec l’avènement des réseaux sociaux qui prônent la perfection à longueur de posts. Des concepts comme le summer body, ou les photos sur Instagram, tout ce qui fait que les gens perdent leurs temps à vouloir être parfait. Ce miroir est souvent notre pire ennemi, ça devient très dur de s’accepter, se valider, être soi-même. J’avais envie de parler de tout ça, d’où la phrase du refrain : « N’aie pas peur y’a pas d’erreur ». Trompe toi, fais des conneries, recommence, on est tous imparfaits et c’est ça qui est joli, qui fait nos singularités. Le principal reste d’essayer. Pour porter ce message il fallait quelqu’un d’important et Jean-Claude Van Damme par son statut d’icône était la personne idéale. C’est un être plein de force, mais aussi d’une grande fragilité. Il est toujours sur le fil, à aborder un sourire au coin des lèvres. Cette puissance nous permettait de transmettre un message : « Regardez comme je suis libre, je fais danser les vagues ».
Avez- vous des rituels avant la sortie d’un album ?
Quelque chose de très simple : souvent on boit un verre avec Olivier, et puis le soir on fait une grosse fête. On célèbre la sortie d’un nouvel album comme une naissance.
Quel est l’album que vous avez préféré écrire ? Une chanson qui vous fait vibrer plus que d’autres ?
Il n’y en a pas vraiment, ça varie selon les moments. Je suis satisfait lorsque je trouve le mot qui correspond exactement à l’émotion que j’ai envie de transmettre. Certaines chansons me viennent très naturellement, et à contrario d’autres ont été difficiles à faire comme par exemple dans cet album la chanson « Apollo ». Elle est passée par pleins de versions qui ne correspondaient pas, elles étaient belles mais quelque chose ne nous plaisait pas, sans que nous puissions mettre l’emphase dessus. Alors nous l’avons laissé de côté pendant 6 mois, et tout d’un coup on a trouvé l’harmonie qu’il nous fallait. Ça a été un grand soulagement et un profond bonheur. Parfois nous l’écoutons tous les deux dans le studio et on se retrouve tous les deux à avoir la chair de poule.
Décris-tu cet album comme différent des autres ?
Chaque album que l’on fait est envisagé comme le premier, cela nous permet d’être vivant, de ne pas s’asseoir sur des acquis. On cherche à sortir de notre zone de confort. Ici par exemple on avait cette envie de chanter en français, cela nous a permis de complètement nous renouveler. L’important pour nous c’est de ne pas nous répéter.
Suite à votre album vous avez prévu une tournée, qui ne s’arrêtera pas à Nantes. Pensez-vous y revenir un jour ?
Bien sûr, on adore jouer à Nantes. Seulement en ce moment avec la crise sanitaire, toutes les tournées sont chamboulées. Si on ne joue pas à Nantes même, c’est qu’on joue sûrement dans la région (Samedi 12 Décembre à Rennes & Vendredi 22 Janvier à Angers, NDLR). Mais nous reviendrons.
Comment envisagez-vous votre tournée dans ce contexte particulier ?
On a de la chance d’avoir un public qui nous suit, et pour cela nous avons décidé de repousser notre tournée, pour être libres et droits dans nos bottes. Je ne me voyais pas du tout faire semblant, on préfère ne rien faire que faire les choses à moitié. La musique est synonyme de liberté, on veut que les gens se prennent dans les bras, s’embrassent lors de nos concerts..