Le renouveau de la pop française

L’âge d’or de la chanson française des années 70-80 a laissé place à un grand vide que l’on a tous connu. Charles de Boisseguin a débuté l’aventure L’Impératrice il y a quelques années, tout seul, avec la simple ambition de faire sauter les clichés entourant la langue française. Pour lui, l’arrivée des rockeurs de La Femme a relancé tout ce mouvement. Il a fallu dépasser les années Gainsbourg & Sanson et cesser de croire que le français est ringard sur un disque. La pop française revient doucement sur le devant de la scène et L’Impératrice y apporte sa touche groove indispensable.

 

Comment s’est formé L’Impératrice et avez-vous trouvé facilement la direction vers laquelle vous souhaitiez aller ?

Charles de Boisseguin : J’ai commencé tout seul en 2012. Des potes avaient un label, Cracki Records, ils m’ont proposé de sortir un disque. On a bossé le premier EP ensemble. Plus tard, j’ai rencontré mon manager Antoine qui a fini par fonder le label Microqlima sur lequel on est signé aujourd’hui. On a bossé sérieusement tous les deux et on est parti de chez Cracki juste après l’EP Odyssée. Entre-temps, il y a eu des demandes de live donc j’ai cherché des musiciens. J’ai rencontré Hagni, le claviériste, qui m’a présenté le batteur puis le bassiste. Flore est arrivée beaucoup plus tard, on ne tournait que tous les 4 au début, on défendait un projet instrumental. Je l’ai rencontré par hasard alors que l’on cherchait une voix et ça s’est concrétisé rapidement.

Depuis que votre formation est complète, est-ce qu’un live vous a marqué plus qu’un autre ?

Il y en a eu plusieurs oui. Cet été aux Solidays, il y avait plus de 20.000 personnes devant nous, c’était énorme. L’année d’avant, je fêtais mes 31 ans sur la scène de We Love Green devant 10.000 personnes. C’est toujours étonnant de voir autant de monde t’écouter mais ce n’est pas ce qu’on préfère, on est plus attiré par les petites salles. Les concerts devant 1000 personnes sont les meilleurs. Mais dans un festival, il y a tout de même quelque chose de particulier, c’est une grande communion, c’est transcendant. C’est une grande messe ! (rires)

L'Impératrice

© Parker Day

Comment avez-vous vécu la sortie de votre premier album Matahari ?

Très bien, les retours furent très bons. On a travaillé un et demi dessus. C’est difficile de passer le cap, on s’est longtemps posé la question. On se demandait si c’était encore nécessaire de sortir un album à l’heure du streaming, les gens consomment la musique différemment désormais. Le long format est devenu plus difficile à placer mais bon c’est le jeu aussi. L’album c’est un concept, ce n’est pas comme l’EP. Et puis c’est un objet ! Il nous permet de tourner plus largement et même à l’étranger, on part aux Etats-Unis et au Mexique l’année prochaine. Ça nous a donné la chance de pouvoir nous exporter.

Parlons de « Vanille-Fraise », votre titre le plus écouté. D’où est venue l’idée originale de ce morceau et du clip qui en a découlé ?

Le morceau en tant que tel est venu assez spontanément. Je réécoutais « Playa » de La Clinique et je me suis demandé d’où venait ce sample. En cherchant un peu, je suis tombé sur « Disco Love » de Ian Pooley qui avait lui-même samplé Anita Ward. Un après-midi où j’avais du temps ! (rires) Au final, j’ai fait le morceau en seulement 3 heures et je ne sais pas pourquoi il a tant circulé ensuite. Les joies d’internet !
Pour le clip, mon amie Alizée Ayrault voulait en tourner à cette période, je lui ai laissé carte blanche. En général lorsque je bosse avec un réal, je lui laisse une totale liberté. J’essaie juste de bien choisir la personne.

Pour rester sur l’aspect visuel, peux-tu nous parler de la pochette de Matahari ?

C’est un graphiste anglais, Mat Maitland, qui s’en est occupé. Il est assez connu en Angleterre, il a bossé pour Prince ou Michael Jackson et il travaille aussi avec de grandes marques.
Mat Maitland mélange beaucoup les genres et les époques, il fait de nombreuses références aux années 70, ce qu’on aime. Cette pochette vaporeuse, nocturne et féminine reflète vraiment cet opus. On défend beaucoup la féminité dans notre musique, à travers la grâce et la volupté. Cette femme dont on ne voit pas le visage retranscrit ce qu’on voulait. Elle a tellement menti sur ce qu’elle était qu’on ne sait finalement pas qui elle est. Une pochette mystérieuse …

Qu’écoutes-tu en ce moment ?

Le morceau « Brutalisme » de Flavien Berger et son album qui a suivi. C’est quelqu’un d’honnête et de brillant, il sent la musique comme peu de gens, il est autodidacte. Il fait des choses que personne ne fait, c’est un artiste touchant.
Sinon rien à voir, la collaboration entre Kali Uchis et Tyler, The Creator sur « After The Storms ». C’est produit par Bootsy Collins. C’est incroyable, je n’ai jamais entendu un morceau qui groovait autant ces dernières années. J’aimerais bien faire quelque chose d’aussi bien un jour ! (rires)

Un petit mot pour les nantais ?

On a vraiment hâte, on a peu joué à Nantes et on sait que beaucoup de gens nous écoutent là-bas. C’est un public vraiment chaud. Les nantais aiment vivre, c’est ce qui nous plaît, on veut faire de la musique pour ce genre de personnes. Ce sont des kiffeurs, on aura un accueil de ouf, c’est sûr !

 

L’Impératrice – Matahari sorti le 2 mars 2018 (Microqlima)
Vendredi 23 novembre à Stereolux (complet)
stereolux.org

Propos recueillis par Alban Chainon-Crossouard