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La pédophilie, ce fléau qui gangrène les rangs de l’Église
Nous commençons avec l’un des films les plus attendus de ce début d’année. Grâce à Dieu était encore mis en suspens à quelques jours de sa sortie en salles. La justice devait déterminer son sort. En effet, la plainte du Père Preynat, sur laquelle le scénario repose, a été déboutée à deux jours de la parution du film. Longuement mis en cause dans ce long-métrage, une telle exposition avait mis le prêtre, encore présumé innocent aujourd’hui, hors de lui. Seulement, le film accuse plus globalement l’Église et principalement le diocèse de Lyon dirigé par le Cardinal Philippe Barbarin. Ce dernier fait d’ailleurs partie des sept personnes citées à comparaître dans l’affaire jugée actuellement.
François Ozon revient donc dans les salles obscures avec un sujet sensible en écho aux tumultes que traversent le clergé. Encore tout récemment, le cardinal Pell, numéro 3 du Vatican, a été condamné pour pédophilie. Le pontificat a pourtant tenté d’atténuer cette crise interminable en ouvrant un sommet sur le sujet il y a quelques jours. Le passé ne cesse cependant d’être remué, les victimes se faisant chaque jour plus nombreuses. Néanmoins, il est essentiel de prendre des pincettes et de ne pas blâmer la religion catholique, le parallèle est parfois trop facile et trop rapide.
Swann Arlaud & Josiane Balasko © Mars Films
Entre le mépris et les pleurs
Accusé d’attouchements, puis de viols, l’histoire retrace celle du Père Preynat et de ses victimes. Elles se rassemblent pour accumuler des preuves et ainsi le dénoncer à la justice mais aussi aux médias. Cette fiction apparaît tellement proche de la réalité qu’il est parfois compliqué de prendre du recul sur cette affaire présente dans tous nos journaux.
Dans Grâce à Dieu, le diocèse de Lyon mené par le Cardinal Barbarin (interprété par François Marthouret) semble faire tout ce qui est en son pouvoir pour étouffer l’affaire Preynat. Melvil Poupaud, qu’on a entendu aux côtés de Benjamin Biolay sur leur album commun Songbook, incarne le rôle le plus important. Dès les premières minutes du film, on constate qu’il sera l’élément déclencheur. Tout semble partir de sa propre décision, celle de faire tomber un prêtre depuis toujours épargné. Salir l’Église et affronter une telle puissance ne sera pas de tout repos. Le film prend une toute autre tournure à partir du moment où le Capitaine Courteau (Frédéric Pierrot) ouvre une enquête qui déterrera les pires souvenirs des victimes et de leurs proches. S’ensuit l’histoire de plusieurs personnages s’alliant contre la puissance diocésaine.
Le film, long de 137 minutes, s’attèle à détailler l’ensemble du sujet de manière très explicative notamment dans les premières minutes. Les ellipses sont courtes et les flashback peu nombreux, le résultat en est d’autant plus saisissant. Francois Ozon, après des films comme « Frantz » ou « Dans la maison » s’attaque à un sujet sensible et c’est un franc succès. Grâce à Dieu vient d’ailleurs d’être acclamé à la Berlinale 2019 où il a reçu le prix du Jury.