Une tribu attachante
Septembre est maussade, je retrouve donc Coline et Pierre à l’intérieur d’un bar, dans la jolie rue des Carmes. Les deux artistes parleront au nom de leur groupe : Inüit. Beaucoup d’artistes nantais tentent leur chance, moins nombreux sont ceux qui sortent du lot. Les six nantais paraissent en bonne voie avec Always Kevin comme premier EP prometteur. On espère de tout cœur que les ailes de leur colombe les portent sur le devant de la scène française.
Comment a débuté l’aventure du groupe ?
Pierre : Elle a commencé avec Coline finalement. Ce qu’on joue et ce qu’on a défendu depuis que Coline est arrivée, c’est de l’inédit. On a créé ça à partir de rien, on se connaît tous depuis très longtemps et même avant que le groupe se monte. Avec Alexis, on avait un trio plutôt électro et on croisait Simon, Pablo et Rémy sur d’autres projets.
Coline : Le projet que l’on partage date d’il y a deux ans seulement.
Pierre : En fait, on se côtoie tous depuis la fin du lycée quand on jouait entre Nantes et Rezé.
D’où vient le nom d’Inüit ?
Pierre : C’est sorti d’un brainstorming, on cherchait un nouveau nom de groupe. Cela devait convenir en terme de sonorité, il devait nous évoquer quelque chose, ce que représente le collectif.
Coline : Inüit sonnait bien ! Un nom joli à l’écrit et à l’oral.
Pierre : Ça sonnait tribus ! Toutes les images que ce nom véhiculait nous ont sûrement aidé à composer et à commencer. On s’est forgé une identité musicale autour de ça.
Benjamin Lebeau de The Shoes vous a aidé à vous faire connaître, comment est arrivée cette rencontre ?
Coline : Au moment de concevoir notre EP, on s’est demandé avec qui on aimerait travailler que ce soit un producteur, un réalisateur ou autre. On s’est tout de suite dit : « Pourquoi pas les The Shoes ? ». Il s’avère qu’on avait un ami qui connaissait un ami qui connaissait l’un des deux membres. (rires) On est donc passé par ce biais là pour lui faire écouter nos premiers morceaux. Il a directement contacté Simon en lui disant qu’il avait envie de travailler avec nous. Il avait l’intention de fonder sa boîte d’édition à ce moment là et qu’il voulait nous signer.
Pierre : Le projet s’est lancé aux Trans’Musicales et c’est arrivé juste après. On a voulu se poser en studio ensuite pour constituer une esthétique musicale mais on avait besoin de l’appui de quelqu’un. On l’a contacté en premier et c’est en aucun doute la bonne personne !
Votre premier EP est cohérent et plutôt réussi, avez-vous déjà de nouveaux projets à venir ? Un nouvel EP ? Un premier album ?
Coline : Un album oui ! Des morceaux ont été créés pour l’album mais on travaille depuis début août pour intensifier ce projet. On a besoin de pouvoir choisir dans un panel de morceaux ceux que l’on préfère. En ce moment on enregistre avec Benjamin, on améliore et on modifie les morceaux. Dans l’idéal on le sortirait en janvier ou février mais il y a souvent des choses qui nous échappent.
Pierre : On sait que ce sera en 2018 mais nous n’avons pas de date précise.
Dans les morceaux déjà sortis, avez-vous une préférence pour l’un d’entre eux ?
Coline : « Hush » est le morceau qui me parle le plus. Il raconte quelque chose qui me touche personnellement.
Pierre : Je dirais « Anne » parce que c’est celui qui m’a le plus étonné après le travail de Benjamin notamment. On a tous les jours la tête dans les morceaux donc on a beaucoup moins de recul. Quand quelqu’un nous propose quelque chose d’un peu différent et que l’on aime bien, c’est vraiment appréciable.
Coline : C’est vrai qu’on l’a tous aimé celui là.
Est-ce que vous vous lassez déjà de certains morceaux ?
Coline : On a tout le temps besoin de renouveau. On retravaille toujours les morceaux notamment pour les live. On ne veut pas rentrer dans une routine donc on ajoute régulièrement des petites modifications.
Pierre : Au moins, depuis que l’EP est sorti, certaines choses sont figées.
Pour rester sur cet EP, expliquez-nous la présence de la colombe sur la pochette.
Pierre : C’est un pigeon.
Coline : Mais non c’est une colombe ! (rires) On a fait une séance photo avec une colombe et un pigeon et c’est la colombe qui a été retenue. Ce sont des visuels du photographe Paul Rousteau. Initialement, on souhaitait faire une composition mais on a été pris de court et on a choisi quelque chose que Paul Rousteau avait déjà fait. Il nous a proposé un panel de photos et nous avons fait notre choix. Il est spécialisé dans les oiseaux, son travail est formidable.
Cette colombe avait un œil percutant, on s’est donc lancés !
Pierre : On l’a appelé Kévin !
Coline : On voulait donner un coup de pieds aux stéréotypes sur la colombe qui est censée être belle et prestigieuse.
Pierre : Mais on a rien contre les Kévin. (rires)
Avec du recul on est vraiment contents.
Coline : Et comme on est 6 dans le groupe, c’était intéressant d’avoir une seule figure qui nous représentait.
Dans les artistes actuels, qui vous impressionne le plus ?
Pierre : J’écoutais ça hier, le rappeur XXXTentacion, il a commencé sa carrière récemment mais a sorti 3 albums d’un coup. Je trouve qu’il y a plein d’esthétiques différentes, de styles différent, ça m’a marqué.
Coline : Ce qui m’a marqué ces derniers temps, c’est le live de -M- Lamomali. J’ai adoré le mélange des musiques, des cultures, le fait qu’il laisse la place à beaucoup de musiciens très talentueux. Ce genre de show m’impressionne vraiment.
En artistes, Gaël Faye m’impressionne depuis des années. Je l’ai vu plusieurs fois sur scène, il est génial, il monte dans les gradins, il partage beaucoup de choses avec son public.
Pierre : Romeo Elvis et toute la scène hip hop belge qui fait des choses très intéressantes.
Les américains aussi comme BadBadNotGood, un trio de jazz qui sort de son milieu musical en allant faire des collaborations avec des artistes de la musique électronique ou même des rappeurs.
Et sur scène ?
Coline : Les deux que j’ai cité (Gaël Faye et -M-) mais aussi Camille qui chante et danse sur scène en faisant des percussions avec son corps. Danyèl Waro est étonnant aussi, il a une pêche terrible ! On dirait un petit sorcier, sosie de Léo Ferré, qui saute partout. (rires)
En terme d’influences, qui pouvez-vous citer ?
Pierre : Elles viennent principalement de la pop. On joue beaucoup avec les synthés pour rechercher les esthétiques des années 80. On a aussi une réflexion collective de producteurs comme si on était seuls derrière l’ordinateur. Autant de producteurs que de groupes de musique nous influencent au final.
Coline : En influence commune, on peut dire l’américain Porches !
Pierre : On est forcément touché par les « band » comme Arcade Fire. John Wizards aussi, ils mélangent musique électronique et musique traditionnelle, ils viennent d’Afrique du Sud.
Coline : On aime bien faire des mélanges de cultures musicales et particulièrement avec la musique afro.
Pierre : Même des sons japonais !
Est-ce qu’un live vous a marqué particulièrement ?
Coline : Le printemps de Bourges. On avait une grosse pression mais il y avait beaucoup de monde et la scène était top !
Pierre : Les scènes qui m’ont marqué, ce sont les premières parties où le public ne venait pas pour nous. On a joué à La Cigale avant Synapson et à L’Olympia avant General Elektriks, c’était un peu improbable et à la dernière minute. C’est passé très vite à chaque fois et pour nos débuts, c’était impressionnant !
Et à Nantes ?
Pierre : On a joué en première partie de Hyphen Hyphen à Stereolux. On est à la Barakason début octobre avec Des Roses.
Coline : On a été à Onyx aussi.
Avez-vous une scène que vous adoreriez faire ?
Coline : Moi ce serait dans un théâtre, je ne sais pas lequel mais c’est ce qui m’attire le plus.
Pierre : En ce moment on pense davantage à produire un beau live, on ne se projette pas encore.
Est-ce que vous commencez à être reconnus dans les rues nantaises ?
Coline : Nos potes nous reconnaissent oui ! (rires) Ça arrive parfois comme aux Rendez-Vous de l’Erdre l’autre jour.
Pierre : C’est quand même assez rare. Inüit est vraiment un groupe, personne n’est vraiment en avant si ce n’est Coline qui est la seule fille.
Coline : Ça m’est arrivé une fois, c’était aux Francofolies de la Rochelle cet été. Une petite fille m’a couru après et est arrivée toute haletante : « Est-ce que je peux avoir un autographe ? ». Du coup on a fait une photo et ça m’a vraiment touchée.
Plus vinyle ou streaming ?
Coline : Plus vinyle pour l’histoire mais je n’ai pas de platine. J’en achèterai une à l’avenir, je trouve ça plus poétique.
Pierre : Vinyle pour l’objet bien-sûr et pour ce que les artistes peuvent en faire. On peut créer quelque chose de plus que la musique. Et le vinyle on l’écoute différemment, on ne le stoppe pas généralement, on ne change pas de chanson. On écoute plus une face qu’un morceau, c’est intéressant.
Après au quotidien, je suis plutôt streaming. Le streaming permet de découvrir de nouveaux artistes, j’écoute davantage de musiques depuis son apparition.